ENTOMOLOGIE FORENSIQUE

EN SUISSE

Claude Wyss & Daniel Cherix


Introduction

Si le premier cas d'entomologie forensique remonte au XIIIème siècle (voir Keh, 1985), il faut attendre la fin du XIXème siècle avec les travaux de Megnin (1894) pour que la première base scientifique de l'utilisation des insectes nécrophages soit publiée. Au cours du XXème siècle, de nombreuses contributions originales ou de synthèses (par ex : Smith, 1986) permettent à différents services de médecine légale d'appliquer ou au moins tenter d'utiliser ces insectes comme dateurs de la mort (i.e. Balthazard, 1928). En Europe, différents entomologistes comme M. Leclercq en Belgique, P. Nuorteva en Finlande, M.I. Marchenko en Russie ont publié de nombreux travaux traitant de la biologie des insectes nécrophages et de cas pratiques sur des cadavres humains. Toutefois, ce n'est que récemment que l'entomologie forensique est entrée dans des Institutions comme le FBI aux Etats Unis et à la Gendarmerie Nationale en France.

C'est à partir de 1993 que l'entomologie forensique a été développée en Suisse par Claude Wyss, inspecteur à la police de sûreté vaudoise. En même temps, une collaboration étroite a été mise en place avec les Instituts universitaires de zoologie (Prof D. Cherix) et de médecine légale (Prof P. Mangin) à Lausanne.

A ce jour, nous avons procédé à plus de 160 expertises sur des cadavres humains. Dans chaque cas, nous avons effectué un constat technique et scientifique complet sur les lieux. Nous avons prélevé la faune entomologique sous toutes ses formes (oeufs, larves pupes, insectes parfaits). Nous avons identifié une trentaine de genres de mouches (Diptera), à savoir 79 espèces (C.Wyss, non publié). Nous avons plus particulièrement rencontré les genres Calliphora, Lucilia, Chrysomya, Protophormia, Phormia, Sarcophaga, Muscina, Phaonia, Fannia, Piophila, Megaselia, Conicera. Des larves et des pupes de Chrysomya albiceps (Wiedemann), de la famille des Calliphoridae, ont été récoltées pour la première fois en Suisse dès 1993, exception faite d'une capture en montagne au col de Bretolet à la frontière franco-suisse (1 femelle, septembre 1966, Aubert, collection du Musée cantonal de zoologie, Lausanne). Pour chaque cas, toutes les informations concernant l'identification des espèces, les stades de développement, ainsi qu'une description des lieux (pour les milieux extérieurs, on utilise la typologie des milieux de Suisse, Delarze et al, 1999), des niveaux thermiques, de l'altitude et des coordonnées topographiques sont enregistrés dans une base de données (C. Wyss, non publié).

Dans toute expertise concernant un décès, le médecin légiste doit estimer de façon aussi précise que possible non seulement les causes de la mort, mais aussi la date. Dans ce dessein, plusieurs méthodes sont employées: estimation suivant la température du corps et la température ambiante, la rigidité et les lividités cadavériques; méthodes histologiques, histochimiques, chimiques, bactériologiques.

En fait, dès que les rigidités cadavériques sont dépassées et que la température corporelle est alignée à la température ambiante, la détermination de la date de la mort de l'individu devient difficile, voire impossible.

Dans tous les cas où aucun indice médical n'est trouvé, la méthode entomologique peut permettre, dans certaines conditions, des estimations plus ou moins précises, voire au jour près.

Les insectes nécrophages soigneusement récoltés sur et autour d'un cadavre sont alors les seuls indicateurs du moment du décès.

 

 

 

Calliphora vicina

 


Lucilia caesar

 


Lucilia spp

 

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